Mortelle Classe : Mitterrand jeunesse (Deadly Class: Reagan Youth)


L'envie d'écrire un billet sur Deadly Class ne vient pas de nulle part. Je savais qu'une adaptation télévisuelle était prévue avec aux commandes les frères Russo (Captain America: Civil War, Avengers: Infinity War,...) mais aussi l'auteur du comics lui-même, Rick Remender. Ce qui laissait penser que la série serait bien encadrée et que tout allait bien se passer.

Le premier épisode est diffusé le 16 janvier 2019 sur SYFY (ce n'est pas totalement vrai mais on s'en fout). Cela tombe parfaitement bien, je suis à New York et non ce n'est pas la création et les chroniques de ce blog qui me permettent de me payer des vacances. Je vous préviens tout de suite, j'ai jugé la série sur un épisode, ce qui n'est pas très malin de ma part. Je le dis à votre place comme cela vous n'aurez pas besoin de me faire la réflexion.

Visuellement cela a beaucoup de style, la bande-son années 80 est fantastique mais catastrophe les dialogues sonnent creux et je ressens un grand moment de gêne en entendant l'un des personnages prononcer cette phrase du bouquin: "Change the world with a bullet".


Ce qui manque à ce premier épisode c'est la profondeur du comics. Une phrase comme celle que je cite ne peut que créer un sentiment de malaise si les personnages ne sont pas très bien traités et si l'histoire est racontée trop rapidement. Ce qui est le cas ici. Je vais donner un exemple très simple mais quand vous voyez le nombre de massacres dans les écoles américaines eh bien oui "change the world with a bullet" c'est moyen-moyen. C'est aussi la preuve que ce qui fonctionne dans un livre ne peut pas toujours marcher à l'écran. En tout cas pas si vous avez décidé de faire de votre série un train fou qui ne s'arrête plus.


Donc maintenant serious business je vais vous parler du comics en évitant de vous spoiler parce que le but de ce blog c'est quand même de vous donner envie de lire, pas de vous faire fuir.

Les personnes qui travaillent sur cette série sont: Rick Remender (scénariste), Wes Craig (dessinateur) et Lee Loughridge (coloriste). Un trio qui fonctionne parfaitement, une Triforce.

C'est important de le souligner car vous pouvez tout à fait tomber sur un comics bien écrit mais très mal dessiné et vice-versa. Prenez n'importe quel bouquin dessiné par Greg Land par exemple, eh bien malheureusement même si l'histoire racontée vaut le détour, il y a Greg Land qui est venu tout saloper. D'ailleurs, je ne vais pas salir mon petit blog tout innocent avec l'un de ses dessins. Je vous laisse le choix, vous êtes libres, Internet c'est pratique et c'est normal si vous décidez de vérifier ce que je raconte et voir si ce mec est réellement un gros dégueulasse.

Tout de suite un chat mignon pour que je puisse oublier ce gars:


Je ne vais pas rentrer dans les détails biographiques de notre trio. Je trouve cela ennuyeux à mourir. Sachez seulement que Rick Remender a beaucoup écrit chez Marvel et Image Comics et que Deadly Class est un comics différent de ses autres travaux car il ne s'agit pas de science-fiction. Wes Craig a bossé pour DC et Marvel mais ce sont ses dessins sur Deadly Class qui ont révélé son talent. Quant à Lee Loughridge, le coloriste, dont tout le monde se fout alors que sa fonction est importante, il a travaillé sur l'adaptation en bd du dessin animé Batman.

Nous sommes en 1987, les années Reagan. Marcus Lopez Arguello, un adolescent, erre dans les rues de San Francisco. Il a une petite forme. Il est sans domicile fixe, c'est vrai que cela n'aide pas. Sa rencontre avec Saya, qui lui propose de rejoindre son école, Kings Dominion, va changer sa vie. Alors que nous savons qu'en vrai si quelqu'un vient vous proposer d'aller à l'école vous rigolez et vous vous enfuyez au plus vite. Évidemment ce n'est pas pour suivre de simples cours de mathématiques avec Monsieur Duchmol qui aime martyriser ses élèves avec des équations à quatre inconnues. Kings Dominion c'est comme Poudlard mais pour les apprentis tueurs. "Murder is an art, killing is a craft and the dagger in your back is no metaphor."

J'en reste là pour l'histoire car je tiens vraiment à titiller votre curiosité et rien d'autre, je vous jure. Vous achetez le premier tome, vous vous faites votre avis et ce qui est pratique c'est que si vous n'aimez pas eh bien pas besoin de vous procurer la suite.


Deadly Class c'est un contexte historique, les années Reagan, et Marcus a une dent contre le président. C'est aussi une critique du système scolaire et Remender l'explique clairement dans la postface du premier recueil de la série. Derrière toute cette histoire autour d'adolescents allant à l'école pour apprendre les meilleurs techniques pour assassiner ses ennemis et pas que, il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un lycée avant tout. Kings Dominion fonctionne de la même manière. Le lycée comporte des codes. Harcèlement scolaire, drogue, sexe, les boutons qu'il faut faire exploser dans son miroir,...

Ce qui vient s'ajouter à la noirceur de cette histoire, c'est la dépression. Marcus ne va pas très bien et ses monologues sont issus, en partie, des journaux intimes de Rick Remender. Deadly Class est finalement un récit très personnel. Les réflexions et les souvenirs du jeune homme déchirent le cœur. Entre phases d'euphorie et dégoût de lui-même, Marcus devient rapidement un personnage attachant. Des moments de doute, de la souffrance et de constantes interrogations sur son utilité: la dépression.


Le comics est par ailleurs mis en valeur par les magnifiques planches de Wes Craig et les couleurs utilisées par Lee Loughridge. Des palettes de couleurs réduites qui alternent en fonction de l'ambiance voulue. Les cases se suivent et ne se ressemblent pas. C'est vif, dynamique et la reconstitution des années 80 est parfaite. Les aventures de Marcus défilent sous nos yeux ébahis à un rythme effréné qui ne met cependant pas de côté l'importance du récit.


Scénario intelligent, du style et de l'action, Deadly Class est addictif. Beaucoup plus que toutes les drogues citées dans la bd. Marcus "finally wanting to live. In a place surrounded by death."

Précisions:

Pour les anglophones et ceux qui souhaitent améliorer leur english reading vous pouvez retrouver Deadly Class aux éditions Image Comics (huit tomes publiés), 15 euros environ et sinon en français chez Urban Comics. Je vous invite d'ailleurs vivement à trouver votre bonheur dans la multitude des bouquins proposés par Image et Urban. En revanche, je ne suis pas responsable si vous cramez votre carte bleue.

Du même auteur, vous pouvez vous jeter sur Black Science, Low et Tokyo Ghost
. Mention spéciale à Low qui a bouleversé mon petit coeur. Là aussi si l'anglais vous donne des boutons, vous retrouverez chez Urban les livres traduits en français.

Un petit remerciement à mon (parfois) insupportable compagnon qui a bien voulu m'éclairer sur certains termes propres au monde des comics avec lesquels je ne me sens pas toujours à l'aise.




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