Ouvrez ouvrez la cage aux oiseaux: Le Chardonneret de Donna Tartt


Je viens de me rappeler que Donna Tartt aime prendre son temps. Un livre tous les dix ans. Je peste car l'impatience me gagne. Je me mets à faire des calculs pour essayer de deviner quand sortira le prochain et il faudra en plus que j'attende une traduction française car je ne trouve pas que mon niveau en anglais me permette de lire aisément des œuvres si riches. J'ai donc les doigts un peu tendus comme des strings en écrivant ces quelques lignes.


J'ai découvert cette autrice il y a quelques années en regardant l'émission littéraire La Grande Librairie. C'était un soir de mai, il faisait beau et chaud (en vrai je ne m'en souviens plus mais on va supposer qu'en mai il est censé faire beau). Yann Queffélec conseillait de lire Le Maître des illusions. Je prends note, ce qu'il raconte m'intrigue et puis hahaha Tartt c'est trop rigolo comme nom. N'empêche que quelques mois plus tard, lorsque je tombe par hasard sur ce livre dans les rayons d'une librairie eh bien c'est le nom de l'autrice qui m'interpelle et m'aide à me souvenir de ce moment où j'avais plissé les yeux en me disant qu'il faudrait peut-être que j'achète ce bouquin. C'est parti, je l'emporte à New York avec moi (alors pour ceux qui ont lu mon billet sur Americanah, non je ne passe pas ma vie dans cette ville).

C'est le début d'une grande histoire d'amour entre les livres de Donna Tartt et moi. Je ne vais cependant pas m'étendre sur le contenu de ses deux premiers romans car je compte bien en discuter sur Codices un jour ou l'autre.


Le Chardonneret est le troisième et dernier livre de Donna Tartt, prix Pulitzer de la fiction 2014. Rien que ça.

Le fil rouge de ce roman, comme le titre l'indique, est un tableau peint par Carel Fabricius en 1654. Pas de bol, cet artiste meurt jeune lors de l'explosion de la poudrière de Delft. BOUM son atelier est détruit et lui avec. C'est également par une explosion que commence l'histoire de Théo Decker, le narrateur de notre roman qui est aussi devenu dans ma vie le héros des jeux vidéo Persona 4 et 5 (pour ceux et celles que j'ai perdu en chemin, on peut choisir les nom et prénom du personnage principal dans ces jeux).


Alors qu'il visite le Metropolitan Museum, un attentat va bouleverser la vie de Théo. Maman est morte, lui survit et se barre tranquillou bilou du musée avec sous le bras Le Chardonneret. Il n'a pas décidé cela tout seul. Un vieux monsieur présent sur les lieux du drame, bien mal en point, le supplie de prendre le tableau. Notre héros n'a que 13 ans, il a encore les oreilles qui sifflent à cause de l'explosion alors ça se comprend. Il n'avait pas trop envie de discuter et c'est à se demander s'il réalise ce qu'il fait. Mec, tu es en train de voler une peinture qui vaut sûrement plus qu'un appartement à New York avec vue sur Central Park.

Evidemment la vie de Théo est à partir de ce moment totalement chamboulée. Il est recueilli par des bourgeois très sympathiques qui lui donnent une autre image de la famille. Celle-ci est unie et aimante. Un petit cocon pour le narrateur parce que lui sa famille c'était une maman toute seule qui galérait et un papa alcoolique qui avait foutu le camp. Néanmoins, n'oublions pas qu'il doit tout de même continuer à gérer ses angoisses. Il a beau vivre désormais chez les riches , un attentat a des conséquences psychologiques qui perturbent et pas qu'un peu.

L'histoire aurait pu s'arrêter là. Il vécu heureux pour toujours à New York dans un bel appartement de Park Avenue avec un tableau volé caché dans ses affaires et eu beaucoup d'enfants. Ce serait rigolo mais évidemment quand ça veut pas ça veut pas et Théo se retrouve à Las Vegas puis de nouveau à New York et enfin à Amsterdam. Je ne vais sûrement pas vous dire pourquoi ni comment. Vous avez la chance d'avoir plus de 1000 pages à lire pour découvrir l'histoire de Théo Decker et je vous envie. Alors que rien ne lui est épargné, que le sort s'acharne sur lui et qu'en plus il n'a pas vraiment les fesses toutes propres et qu'il se laisse entraîner dans une spirale vicieuse dont il a du mal à se dépêtrer, le héros est entouré de personnages qui vont tout de même l'aider à évoluer dans ce monde où il a du mal à trouver sa place. L'ami Boris et ses paradis artificiels, Hobbie l'antiquaire naïf qui pardonne tout à Théo, Pippa l'amour secret,... Et toujours étroitement lié au parcours chaotique du narrateur, l'ombre du Chardonneret.


Oui, comme je l'ai dit au début de ce billet, Donna Tartt prend son temps et finalement tant mieux. Que ce soit au niveau de la qualité de l'écriture ou des recherches effectuées, il faut bien toutes ces années pour réussir à satifaire lecteurs et lectrices. Réussir à nous emporter dans l'histoire de Théo et du traumatisme dont il ne se remet pas, la mort de sa mère tant aimée. C'est un roman d'apprentissage (spécialité de l'autrice) qui décrit donc progressivement le cheminement du narrateur. Il y a du Dickens dans ce livre. Donna Tartt y développe les notions du bien et du mal, du rapport à la culpabilité et à la responsabilité et cela avec une petite touche de suspense qui apporte un côté thriller dans certains passages.

Dans toute cette noirceur et ces inquiétudes permanentes qui s'immiscent insidieusement ou violemment dans nos vies, je retiens que "tout ce qui peut nous apprendre à nous parler à nous-mêmes est important : tout ce qui peut nous apprendre à sortir du désespoir en chantant".


À lire, à découvrir

Les vacances d'été approchent à grand pas, un livre de Donna Tartt est parfait pour accompagner vos apéritifs et moments de farniente :
Le Chardonneret chez Pocket, 11,50€
Le petit copain chez Pocket, 9,40€
Le Maître des illusions chez Pocket, 8,60€

Un conseil de Stephen King concernant Le Chardonneret mais cela s'applique aussi aux autres livres de Donna Tartt : "ne le faites pas tomber sur votre pied"

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